Episode 03

EXT. SOIR. CHAPITEAU - VALENCE

Le Bleu défie le chapiteau du regard. La clameur qui en provient le fait hésiter, mais il finit par se lancer. Dans le flot de personnes regroupées dans le petit chemin formé par les barrières de sécurité, le Bleu, pour s’engouffrer, se retrouve obligé de recourir à la solution extrême de la mise en 2D de lui-même : comme dans une fresque égyptienne, notre Bleu progresse peu à peu selon un enchaînement de figures maîtrisées. Il évite de peu une giclée de vin qui lui permet de le camoufler au regard du videur : le Bleu se jette à l’intérieur du chapiteau.

INT. SOIR. CHAPITEAU - VALENCE

Le Bleu fait le tour de l’espace en penchant sa tête, pas toujours discret, sur les cartes d’accréditation qui pendent autour des cous. Il finit par trouver un producteur qui attend de se faire servir au comptoir, un verre vide à la main, et, avant même de se présenter, se lance dans une logorrhée.

LE BLEU

Pas mal euh l’ambiance, hein ? Non parce que… Enfin c’est cool ce festival… Pratique quoi, les rencontres, enfin le réseau… Enfin je veux pas non plus… Parce que les auteurs oui ça va deux secondes hein, enfin j’imagine… Il est bon ce vin ? Non mais je vais éviter, parce que… Pourquoi je parle de ça ? Oui ! Alors je me disais, tant qu’on fait la queue, du coup, ben c’est l’histoire d’une médecin qui doit se rendre à un observatoire pour fuir son amoureux… enfin, non, c’est pas vraiment son amoureux parce qu’il est pas très sympa. Mais ça finit bien hein ! Merde j’ai dit la fin… Mais c’est pas un truc à chute, c’est plus une recherche, un peu conceptuel, il se passe rien mais tout… Un peu difficile à pitcher en quelques secondes quoi ! Du coup, il se rend à un observatoire gardé par des corbeaux, mais enfin ça c’est pas très important parce que sa quête initiale devient initiatique quand il se fait voler son GPS par un kleptomane des montagnes qui le détourne de son objectif parce que la médecin, elle s’appelle Karine, se réfugie dans une grotte. Et dans la grotte bon alors moi j’imagine une grotte un peu grotte de Lascaux, rupestre chic mais sans fioritures, ouais j’ai beaucoup d’idées visuelles, en fait j’aimerais peut-être bien réaliser aussi mais bon bref parce que l’important, c’est qu’il y trouve un homme… attaché.
(Le Bleu fait un tout petit bond en arrière, et fixe le producteur avec des yeux de stupeur pour souligner le caractère effrayant de l’événement. Pas de réaction du producteur.)
Ok, et le gars a été oublié par un ancien employé qui l’a séquestré, parce que… euh ouais, dimension politique, j’y tiens. Et il raconte son histoire à la médecin, mise en abîme, tout ça… Et dans son histoire une autre personne raconte son histoire au futur séquestré, donc double mise en abime, faut suivre mais je crois au spectateur, à un moment faut aussi pas, enfin, ouais donc : elle a mangé son père en pâté sans le savoir. La médecin tombe amoureuse du séquestré. Suite à ce récit, ils font l’amour sauvagement. La médecin, touchée, délivre le séquestré et fuit avec lui vers un ailleurs, mais elle décide de le ré-enchaîner deux fois par semaine pour faire durer la pass…

Le Bleu lève les yeux : le producteur est parti. Le Bleu est dépité. Il tourne la tête vers le comptoir. Le serveur le regarde.

LE SERVEUR, ému

Elle est vraiment top ton histoire.

EXT. SOIR. CHAPITEAU - VALENCE

Le Bleu défie le chapiteau du regard. La clameur qui en provient le fait hésiter, mais il finit par se lancer. Dans le flot de personnes regroupées dans le petit chemin formé par les barrières de sécurité, le Bleu, pour s’engouffrer, se retrouve obligé de recourir à la solution extrême de la mise en 2D de lui-même : comme dans une fresque égyptienne, notre Bleu progresse peu à peu selon un enchaînement de figures maîtrisées. Il évite de peu une giclée de vin qui lui permet de le camoufler au regard du videur : le Bleu se jette à l’intérieur du chapiteau.

INT. SOIR. CHAPITEAU - VALENCE

Le Bleu fait le tour de l’espace en penchant sa tête, pas toujours discret, sur les cartes d’accréditation qui pendent autour des cous. Il finit par trouver un producteur qui attend de se faire servir au comptoir, un verre vide à la main, et, avant même de se présenter, se lance dans une logorrhée.

LE BLEU

Pas mal euh l’ambiance, hein ? Non parce que… Enfin c’est cool ce festival… Pratique quoi, les rencontres, enfin le réseau… Enfin je veux pas non plus… Parce que les auteurs oui ça va deux secondes hein, enfin j’imagine… Il est bon ce vin ? Non mais je vais éviter, parce que… Pourquoi je parle de ça ? Oui ! Alors je me disais, tant qu’on fait la queue, du coup, ben c’est l’histoire d’une médecin qui doit se rendre à un observatoire pour fuir son amoureux… enfin, non, c’est pas vraiment son amoureux parce qu’il est pas très sympa. Mais ça finit bien hein ! Merde j’ai dit la fin… Mais c’est pas un truc à chute, c’est plus une recherche, un peu conceptuel, il se passe rien mais tout… Un peu difficile à pitcher en quelques secondes quoi ! Du coup, il se rend à un observatoire gardé par des corbeaux, mais enfin ça c’est pas très important parce que sa quête initiale devient initiatique quand il se fait voler son GPS par un kleptomane des montagnes qui le détourne de son objectif parce que la médecin, elle s’appelle Karine, se réfugie dans une grotte. Et dans la grotte bon alors moi j’imagine une grotte un peu grotte de Lascaux, rupestre chic mais sans fioritures, ouais j’ai beaucoup d’idées visuelles, en fait j’aimerais peut-être bien réaliser aussi mais bon bref parce que l’important, c’est qu’il y trouve un homme… attaché.
(Le Bleu fait un tout petit bond en arrière, et fixe le producteur avec des yeux de stupeur pour souligner le caractère effrayant de l’événement. Pas de réaction du producteur.)
Ok, et le gars a été oublié par un ancien employé qui l’a séquestré, parce que… euh ouais, dimension politique, j’y tiens. Et il raconte son histoire à la médecin, mise en abîme, tout ça… Et dans son histoire une autre personne raconte son histoire au futur séquestré, donc double mise en abime, faut suivre mais je crois au spectateur, à un moment faut aussi pas, enfin, ouais donc : elle a mangé son père en pâté sans le savoir. La médecin tombe amoureuse du séquestré. Suite à ce récit, ils font l’amour sauvagement. La médecin, touchée, délivre le séquestré et fuit avec lui vers un ailleurs, mais elle décide de le ré-enchaîner deux fois par semaine pour faire durer la pass…

Le Bleu lève les yeux : le producteur est parti. Le Bleu est dépité. Il tourne la tête vers le comptoir. Le serveur le regarde.

LE SERVEUR, ému

Elle est vraiment top ton histoire.